Formée à la danse contemporaine en tant que danseuse-interprète en France (formation Coline) et en Angleterre (London Contemporary Dance School), collaborant avec, entre autres, les Ballets C de la B, Mathilde Monnier, Emanuel Gat, Ben Duke ou plus récemment Mélanie Perrier au sein de la Compagnie 2Minimum, la réalisatrice Doria Belanger développe depuis quelques années un travail personnel qui se donne à voir sous la forme d’installations vidéo (DONNEZ-MOI UNE MINUTE, JOULE), de propositions chorégraphiques in situ (JOULE-IN SITU, NUIT INTÉRIEURE) et de films dansés (VENT APPARENT, UNE ILE DE DANSE). Ce chemin l’intéresse en ce qu’il permet de « capturer la danse », en conjurant la dimension éphémère du spectacle vivant tout en l’enrichissant d’une dimension picturale.
SYNOPSIS
Dans une ville déserte qui semble avoir échappé au temps, deux êtres solitaires dansent avec le vent. De poussière en poussière, leur rencontre donne vie aux éléments. Un conte physique et métaphysique sur les origines du vent.
statement
Le vent ne se voit pas, il s’éprouve. Le vent s’engouffre, soulève, bouscule, porte, berce, caresse, fouette... autant de manières de recevoir et d’appréhender ce souffle extérieur qui a beaucoup à voir avec la respiration du monde. Car on peut autant utiliser le vent que le subir. Résister ou se laisser porter.
En physique, on nomme vent apparent le vent tel qu’il est ressenti par l’observateur en mouvement. C’est cette notion que j'ai désiré développer visuellement, à travers deux personnages énigmatiques, en ce qu’elle se concentre sur le corps ressentant. Mon approche se veut ainsi fondamentalement sensible. Quel meilleur moyen que la danse, en tant que manifestation éphémère du mouvement, pour en exprimer les nuances ? La danse et le vent : quel dialogue possible, quels points de contact ?
Initialement formée à la danse et à la chorégraphie, je cherche en tant que réalisatrice à m’émanciper du texte dit et de la narration imposée par le scénario de cinéma afin de toucher, émouvoir, faire réfléchir, dans ce langage universel qu'est la danse, le corps dansant, en mouvement. Mon approche se veut naturelle, sans artifice, au service de l’émotion provoquée par le mouvement.
Le Havre, en tant qu’entrée maritime, est une ville particulièrement ventée. En outre, ses ressources architecturales multiplient les perspectives et les effets de vents, créant une diversité exceptionnelle de souffles urbains, sans oublier l’esthétique des lignes et des courbes, extrêmement inspirantes visuellement et pour la mise en scène. Accélérations, tourbillons, aspirations, pressions, variations, etc. : autant d’effets propices à une succession de chorégraphies convoquant la légèreté et la masse, la lutte et l’insouciance, capables de donner naissance à un grand bal urbain, centré sur la rencontre de deux êtres isolés, rassemblés par le souffle. J'ai cherché en outre à recréer dans mon film un espace de rencontre pour les deux êtres qui soit allégorique, sans réelle indication de temporalité ou de lieu, et le Havre, avec ses constructions à la fois classiques et (rétro)futuristes en incarne l’idée.
Un mot enfin sur la partition sonore, toujours essentielle puisque je réalise des films sans paroles : avec le compositeur Méryll Ampe, nous avons travaillé sur un score extrêmement écrit, jouant sur les nuances de vent, apparition / disparition, variations d’intensité / aspirations, souffle / granularité, perturbations, etc. et ce, afin d’en restituer toute la dimension sensible.
Au final, le film se donne à voir comme un voyage sensoriel au cœur d'une grande célébration des danses du vent.